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Le projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité


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01122005

Le projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité


Le Ministre de l’Intérieur a présenté en Conseil des Ministres son récent projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers. Ce projet de loi, qui risque d’être adopté prochainement, a des incidences importantes sur l’utilisation des technologies de l’information et de la communication. L’exposé des motifs de la loi précise d’ailleurs que le renforcement des contrôles est nécessité par le fait que « les terroristes utilisent fréquemment les réseaux de communication, soit pour déclencher des actions criminelles, soit pour préparer ces actions et constituer des réseaux ». Le projet de loi contient des dispositions que nous n’étudierons pas ici, relatives notamment aux contrôles d’identité dans les trains internationaux, au dispositif de surveillance automatique des véhicules, volés notamment, sur tous les points du territoire. Le texte comprend également des dispositions procédurales relatives notamment à l’aggravation de la répression de l’association de malfaiteurs terroristes, la centralisation auprès de certaines juridictions de l’application des peines pour le suivi des personnes condamnées pour des actes de terrorisme, les possibilités de déchéance de la nationalité française et les dispositions relatives à la lutte contre le financement des activités terroristes.

Sur le plan des technologies de l’information et de la communication, les dispositions du projet de loi entraînent des sujétions très importantes, à la fois pour les citoyens ainsi que pour les professionnels de la communication.

I – Le développement de la vidéosurveillance

Le texte du projet de loi permet un développement du recours à la vidéosurveillance qui doit avoir pour but de protéger les lieux accueillant du public et les installations « sensibles exposées à une menace d’acte de terrorisme ». Dans la mesure où le texte légal actuel (loi du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité) ne permet pas l’implantation de système de caméras comme outil de prévention des actes de terrorisme, le dispositif prévoit d’une part la possibilité d’installer des systèmes de vidéosurveillance sur la voie publique ou dans des lieux et établissements ouverts au public pour une finalité de prévention des actes de terrorisme, d’autre part de permettre aux personnes morales « exposées à des risques d’acte de terrorisme » de déployer des caméras filmant la voie publique aux abords immédiats de leur bâtiment.

La question se pose de savoir comment ces bâtiments sensibles vont être déterminés.

Le projet prévoit que le préfet donnera des autorisations, qui seront limitées à 5 ans, à l’expiration desquels il sera à nouveau vérifié si les motifs ayant permis la mise en place de caméras demeurent pertinents. Il s’agit tout de même d’un délai long pour des installations contraignantes. Il est en outre précisé que les enquêteurs spécialisés dans la lutte contre le terrorisme pourront être destinataires de ces images prises par ces systèmes de vidéosurveillance installés dans des lieux privés. Le projet de loi prévoit également de normaliser les systèmes de vidéosurveillance. Un arrêté ministériel devrait être pris afin de définir les normes techniques d’agrément garantissant leur bon fonctionnement. En outre, le texte prévoit également qu’une autorisation provisoire d’urgence puisse être sollicitée. Elle sera d’une durée maximale de 4 mois.

Le dispositif va également plus loin en permettant à l’autorité publique de prescrire la vidéosurveillance de certains sites constituant des cibles potentielles. Sont visées les centrales nucléaires, les grandes installations industrielles ainsi que les aéroports et les gares.


II – Nouvelles contraintes sur les opérateurs de communication électronique

C’est sans doute sur ce point que le projet de loi est le plus novateur, mais aussi le plus contestable et le plus dangereux. Le texte rappelle que les opérateurs de communication sont soumis à une obligation de conservation de certaines données techniques de connexion en application de l’article L.34-1 du Code des postes et communications électroniques.
La loi propose de modifier ledit article en assimilant les fournisseurs d’accès de type cybercafés aux opérateurs de communications électroniques. Le texte qui serait adopté serait extrêmement contraignant dans la mesure où l’article L. 34-1 du Code des postes et communications électroniques se verrait adjoindre l’alinéa suivant : « Les personnes qui, au titre d’une activité professionnelle principale ou accessoire, offrent au public une connexion permettant une communication en ligne par l’intermédiaire d’un accès au réseau, y compris à titre gratuit, sont soumis au respect des dispositions applicables aux opérateurs de communications électroniques en vertu du présent article ».
Cette sujétion, si elle était mise en œuvre, serait extrêmement contraignante dans la mesure où le texte vise également les personnes qui offrent un service d’accès au réseau à titre accessoire tel que les hôtels, les centres d’affaires, certains cafés…etc.
Cette obligation est d’autant plus contraignante que lesdites données peuvent faire l’objet de demandes de communication par les services de police spécialisés dans la prévention du terrorisme. En effet, le projet de loi prévoit également que lesdits services pourront demander communication à ces opérateurs et prestataires ainsi mentionnés les données suivantes :

- identification des numéros d’abonnement ou de connexion à des services de communications électroniques ;
- recensement des abonnements d’une personne désignée ;
- données de localisation des équipements terminaux ;
- données techniques relatives aux communications d’un abonné.

Cette obligation durerait 5 ans, mais la CNIL, dans son avis du 24 octobre 2005, a recommandé que cette obligation soit ramenée à un délai de 3 ans. La CNIL souhaiterait en outre que soient précisé les services qui accèderont à ces données, la nature de celle-ci et les modalités d’information et e droit d’accès des personnes concernées.
Cependant, si l’on comprend l’intérêt de telles demandes, faites à de véritables opérateurs de communication, on peut s’interroger sur la pertinence de ces demandes faites aux nouveaux opérateurs prévus par le texte tels que les cybercafés, les hôtels etc… Il s’agit en effet de données qu’ils pourront difficilement détenir.
Dans le cadre de cet arsenal particulièrement contraignant, le texte prévoit cependant un certain nombre de garanties, sans doute afin de ne pas déchaîner les foudres de la CNIL : motivation, centralisation et enregistrement des demandes par l’UCLAT (Unité de Coordination de la Lutte Anti Terroriste) ; validation par une personnalité qualifiée désignée après avis de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité ; contrôle a posteriori par cette commission et établissement d’un rapport d’activité annuel.
L’exécutif a eu cependant la bonté de prévoir que les surcoûts identifiables et spécifiques éventuellement exposés par les opérateurs, prestataires et personnes mentionnées pour répondre à ces demandes feront l’objet d’une compensation financière.

III – Sur les nouveaux recoupements de fichiers

Le projet de loi propose également de permettre aux services de police spécialement chargés des actions terroristes de procéder à de nouvelles analyses et recoupements de fichiers. Les nouvelles données qui pourraient être consultées par ces services spécialisés sont à la fois des données privées et des données publiques. Le projet prévoit ainsi que ces services puissent analyser les données recueillies dans le cadre des transports de voyageurs notamment en vue de repérer les personnes qui se rendent de manière répétée ou prolongée vers des pays qui seraient connus pour abriter des activités de nature terroriste.
Les fichiers utilisés par les compagnies aériennes (notamment le système APIS, Advance passenger formation système et le système PNR, Passenger Name Records) pourraient notamment être consultés. Ces systèmes traitent notamment, sous forme électronique, les données requises pour identification des voyageurs embarqués et les données enregistrées lors de la réservation du titre de transport. Cette consultation, qui parait extrêmement intrusive dans la vie privée, ne serait limitée « qu’aux services chargés de la lutte anti-terroriste, et de ceux chargés de la sûreté des transports internationaux ».
Cependant, le texte précise également que cela servira à la lutte contre l’immigration irrégulière et qu’une interconnexion du traitement sera mise en œuvre avec le Fichier des Personnes Recherchées (FPR). Le texte prévoit enfin également la consultation de certains fichiers administratifs du Ministère de l’Intérieur par les services de Police chargés de prévenir les actions terroristes.
Il s’agit là encore, en quelques mots, d’une petite révolution. En effet, les personnels de ces services chargés de la lutte anti-terroriste auront ainsi librement accès aux fichiers de traitement automatisé suivants : - fichier national des immatriculations ; - système national de gestion des permis de conduire ; - système de gestion des cartes nationales d’identité ; - système de gestion des passeports ; - système automatisé de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France ; - les données à caractère personnel mentionnées aux articles L.611-3 à L.611-5 et L. 611-6 du Code de l’entrée du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Bien que seuls les enquêteurs « spécialement habilités et affectés dans des services strictement chargés de la prévention du terrorisme » pourront y accéder, l’exposé des motifs de la loi indique d’ores et déjà que « <il s’agit notamment de l’unité de coordination de la lutte anti-terroriste (UCLAT), de la sous direction de la recherche de la Direction Centrale des Renseignements Généraux (DCRG) et de la Direction de la Surveillance du Territoire (DST). »

Certes, la finalité de cet accès doit être strictement limité à la prévention du terrorisme mais on peut s’interroger sur la suite qui serait donnée par les agents de ces services qui ne sont pas affectés exclusivement à la lutte contre le terrorisme, à des infractions de droit commun qui seraient révélées par la consultation de ces fichiers. La CNIL, dans son avis précité à demandé à être associée, par ses pouvoirs de contrôle, au nouveau dispositif mis en place, ce que le gouvernement semble avoir accepter. En outre, elle a demandé, pour chacun des dispositifs, des garanties renforcées.

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